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Qu’est-ce que le contrôle coercitif ?

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Cet article reprend des éléments tirés de nos recherches en cours et de nos formations. Afin de ne pas alourdir le texte, nous n’avons cité que quelques références. Les citations ont été traduites de l’anglais par nos soins, sauf mention contraire. Nous remercions Marie-Chanel Gillier pour sa relecture.

Pour citer cet article : Sueur, G. et Prigent, P.-G. (2020, juin 23). Qu’est-ce que le contrôle coercitif ? Réseau International des Mères en Lutte. https://reseauiml.wordpress.com/2020/06/23/quest-ce-que-le-controle-coercitif/

Gwénola Sueur et Pierre-Guillaume Prigent

Le concept de contrôle coercitif, actualisé en 2007 par le chercheur américain Evan Stark, est repris dans plusieurs législations au Royaume-Uni.  Ce concept a été pensé et nommé par d’autres que lui, notamment des militantes et chercheuses féministes à partir des années 1970 aux États-Unis. Ce modèle est aujourd’hui utilisé par des survivant-e-s de violence et des intervenant-e-s. Il sert également de grille d’analyse à des chercheur-e-s. Le Réseau International des Mères en Lutte mobilise ce modèle depuis plusieurs années et diffuse régulièrement des informations à ce sujet. Il existe par ailleurs aujourd’hui « un intérêt international croissant pour traduire le concept de contrôle coercitif […] en politique et pratique de justice pénale » (Barlow et al., 2020).

Comment définir le contrôle coercitif ?

Evan Stark débute son ouvrage en racontant l’histoire de Terry Traficonda, tuée par son conjoint en 1989. Il déclare qu’elle était « otage dans sa propre maison« , cette comparaison ayant pour but de nous aider à mieux comprendre le mécanisme.

Le contrôle coercitif est une « conduite calculée et malveillante déployée presque exclusivement par les hommes pour dominer une femme, en entremêlant des violences physiques répétées avec trois tactiques tout aussi importantes : l’intimidation, l’isolement et le contrôle » (Stark, 2007). Dans un texte plus récent (2017), Evan Stark intègre au contrôle coercitif la coercition et les agressions sexuelles. Le contrôle coercitif continue à s’exercer après la séparation, et permet à l’agresseur de prolonger les violences par l’intermédiaire des enfants (Feresin et al., 2019). Des études commencent à prendre en compte l’effet du contrôle coercitif sur les enfants (Katz et al., 2020).

Evan Stark considère que « le principal préjudice infligé par les hommes violents est politique, et non physique, et relève de la privation de droits et de ressources nécessaires à la personne et à la citoyenneté » (Stark, 2007).

Pour ce chercheur américain, l’agresseur adopte une stratégie visant à piéger sa victime :

Les victimes de contrôle coercitif sont fréquemment privées de ressources financières, de nourriture, d’accès à la communication et aux transports, alors même qu’elles sont coupées de leur famille, de leurs amis et de tout autre soutien. Mais contrairement à d’autres formes de crimes, le contrôle coercitif est personnalisé, il s’étend dans l’espace et dans le temps, et il est genré dans la mesure où il s’appuie sur la vulnérabilité créée par des inégalités. Une autre différence tient à son objectif. Le contrôle coercitif est déployé pour garantir les privilèges des hommes, qui incluent l’utilisation du temps, le contrôle des ressources matérielles, l’accès à la sexualité, et les services personnels. Comme les agressions, le contrôle coercitif porte atteinte à l’intégrité physique et psychologique des victimes. Mais le principal moyen pour instaurer le contrôle est la micro-régulation des comportements quotidiens associée aux stéréotypes quant aux rôles féminins, comme leur vêtement, la cuisine, le ménage, les relations aux autres, le soin des enfants, et la sexualité (Stark, 2007 ; traduction par Pauline Delage, 2017).

Le contrôle coercitif est en effet rendu possible par les inégalités entre les femmes et les hommes, qui sont nombreuses, y compris économiques et matérielles. Elles existent notamment dans la famille, avant comme après la séparation du couple. La privation de ressources qu’organise l’homme violent se cumule avec le fait que sa victime dispose déjà, en moyenne, de moins de ressources que lui.

En 1978, la sociologue française Colette Guillaumin parle de l’appropriation des femmes par les hommes : appropriation du temps et du corps, notamment. Que veut dire « entretien matériel physique« , se demande-t-elle : « d’abord une présence constante. Pas de pointeuse ici, une vie dont tout le temps est absorbé, dévoré par le face-à-face avec les bébés, les enfants, le mari ; et aussi les gens âgés ou malades« . Ainsi, « chaque seconde de temps […] est absorbée dans d’autres individualités« , et cette absorption est le terreau parfait pour l’exercice du contrôle coercitif.

Dans son ouvrage Surviving Sexual Violence, publié en 1988, la sociologue britannique Liz Kelly forge le concept de continuum. À partir d’entretiens réalisés avec des femmes, elle constate que « la plupart des femmes ont subi de la violence sexiste au cours de leur vie ; il y a une variété de comportement masculins que les femmes vivent comme violents ; la violence sexiste survient dans le contexte du pouvoir des hommes et de la résistance des femmes« .

En résumé, les femmes subissant du contrôle coercitif estiment que ce qu’elles subissent est moins grave que ce que leurs partenaires les ont empêchées de faire pour elles-mêmes, la société patriarcale restreignant déjà leurs opportunités.

En 2007, Evan Stark propose de modifier l’intervention auprès des femmes victimes en considérant leurs droits à la liberté en même temps que leur sécurité, et de criminaliser le contrôle coercitif.

Criminaliser le contrôle coercitif

Un colloque international « Contrôle coercitif : améliorer les réponses à la violence conjugale« , auquel nous avons assisté, fut organisé par le collectif de Recherche FemAnVi les 17 et 18 avril 2019 à Ottawa. Ce colloque regroupait des expert-e-s provenant du Canada, des États-Unis et du Royaume-Uni. En plus de présenter avec précision le concept, ce colloque a examiné attentivement comment il peut être utilisé dans différents contextes et quels sont les avantages d’adopter cette conceptualisation de la violence conjugale. La notion doit d’abord être connue et comprise avant d’envisager d’en faire une infraction spécifique.

Marsha Scott (directrice de la Women’s Aid en Écosse) et Evan Stark sont revenu-e-s sur le cadre favorable à la mise en place d’une infraction spécifique. Evan Stark le désigne par le « cadre contrôle coercitif« .

Angleterre, Pays de Galles et Écosse

Le contrôle coercitif est considéré comme une infraction en Angleterre et au pays de Galles depuis 2015, avec l’adoption du Serious Crime Act 2015. Néanmoins, la version actuelle de la législation n’est pas sans critique et doit être révisée, selon Stark lui-même notamment (Barlow et al., 2020 ; Stark, 2020). Il ne concerne pas par exemple les ex-partenaires ou conjoint-e-s.

En Écosse, le « cadre contrôle coercitif » permet d’adopter à l’unanimité le Domestic Abuse (Scotland) Act 2018 par le Parlement en février 2018. Il est considéré comme une « référence absolue » (gold standard) par Marsha Scott. C’est un véritable consensus qui a conduit à l’adoption et à la mise en œuvre cohérente du modèle, dans la loi.

Il s’agit d’une infraction spécifique de violence « domestique« , qui couvre non seulement les violences physiques, mais aussi d’autres formes de dommages psychologiques et de comportements de coercition et de contrôle. La législation s’appuie sur l’expérience des victimes de violences « domestiques » et reconnaît que le contrôle coercitif est tout aussi dommageable que les agressions physiques, et peut détruire l’autonomie d’une victime. La législation reconnaît également l’impact sur les enfants.

Quelles sont les limites à la loi ?

Des chercheur-e-s identifient des limites à la loi, voire au concept en lui-même. Certaines de ces limites, actuellement débattues, sont des hypothèses tandis que d’autres font l’objet d’études empiriques. Nous en présentons ici un bref aperçu.

La notion serait mal comprise et souvent confondue avec la seule violence psychologique. Or, comme indiqué ci-dessus, le contrôle coercitif comprend ce type de violences, mais ne s’y limite pas. Stark (2020) l’analyse ainsi : « le travail sur le contrôle coercitif vise à changer la situation dans son ensemble et non à ajouter de nouveaux comportements à une série d’infractions distinctes (qui ne sont déjà pas appliquées)« .

Inscrire le contrôle coercitif dans la loi ne résoudrait pas la difficulté à trouver des preuves, par exemple pour la micro-régulation de la vie quotidienne, d’autant plus que ce micro-management est banalisé, normalisé dans une société patriarcale.

Ce n’est pas parce que le contrôle coercitif devient une infraction que la tendance du système judiciaire à blâmer ou maltraiter les victimes va disparaître. On peut par exemple tout à fait imaginer des refus de prendre des plaintes pour contrôle coercitif par la police, comme le montre l’expérience anglaise.

Le contrôle coercitif se poursuivant après la séparation, une autre question se pose : est-ce que la création d’une telle infraction permettrait de déjouer le phénomène de la complicité institutionnelle ? Par exemple lorsque les institutions imposent des contacts entre l’agresseur et la victime au nom de l’autorité parentale conjointe.

Quels sont les intérêts du modèle ?

Il a été souligné que la loi pourrait minimiser l’importance des violences physiques dans la violence conjugale. Or, Stark indique que « les agressions physiques sont une partie essentielle de cette stratégie [de contrôle coercitif], elles causent souvent des blessures et sont parfois fatales« . La loi comme le concept permettraient plutôt de rappeler l’importance des autres formes de violences, notamment psychologiques et du contrôle. Rappelons qu’en France, en 2001, l’enquête Enveff montrait que « le terme de ‘femmes battues’ couramment utilisé ne rend pas compte de la totalité des violences conjugales puisque le harcèlement moral y tient une grande place« .

La notion de contrôle coercitif permet d’analyser le récit des femmes victimes dans son intégralité, avant de chercher un incident isolé correspondant à une infraction particulière. Elle rend visible les différentes techniques employées par l’agresseur pour maintenir pouvoir et contrôle.

Les pays qui ont inséré le contrôle coercitif dans leur législation ont rédigé des directives, adressées aux intervenant.e.s, pour les aider à identifier le contrôle coercitif. Voici quelques exemples de tactiques, traduites par nos soins, qui peuvent être employées par l’agresseur :

  • isoler une personne de ses amis et de sa famille
  • la priver de ses besoins fondamentaux
  • contrôler, gérer son temps
  • la surveiller via des outils de communication en ligne ou utiliser des logiciels espions
  • prendre le contrôle des aspects de sa vie quotidienne, tels que les endroits où elle peut aller, qui elle peut voir, ce qu’elle peut porter et quand elle peut dormir
  • la priver de l’accès aux services de soutien, tels que le soutien spécialisé ou les services médicaux
  • la rabaisser de manière répétée en lui disant qu’elle n’a aucune valeur
  • imposer des règles et des activités qui l’humilient, la dégradent ou la déshumanisent
  • la forcer à participer à des activités criminelles telles que le vol à l’étalage, la négligence ou la maltraitance d’enfants pour encourager l’auto-culpabilisation et empêcher la divulgation aux autorités
  • l’abuser financièrement, y compris par le contrôle des finances et des ressources incluant une stratégie pour l’endetter
  • contrôler sa volonté de s’instruire (études) en la rendant incapable de le faire
  • lui prendre ses salaires, avantages ou indemnités
  • menacer de la blesser ou de la tuer
  • menacer de nuire à l’enfant du couple
  • menacer de révéler ou de publier des informations privées
  • menacer de blesser, ou blesser physiquement, un animal familier
  • commettre des dommages criminels (tels que la destruction des biens immobiliers, mettre le feu)
  • empêcher sa/son partenaire d’avoir accès au transport ou de travailler
  • l’empêcher de pouvoir aller à l’école, au collège ou à l’université
  • atteindre à sa réputation
  • divulguer son orientation sexuelle
  • divulguer sa séropositivité ou une autre condition médicale sans consentement
  • limiter l’accès à sa famille, à ses amis et aux finances

Dans le cadre de nos recherches, mais également lors du soutien aux mères séparées et divorcées, nous avons fait le constat que si le contrôle coercitif avait des impacts, les femmes mettaient en place des stratégies de résistance au contrôle et à la violence (ce que l’Enveff a également montré). On reproche trop souvent aux victimes d’être « impuissantes », « passives », « soumises », bien qu’elles ne le soient pas. Subir du contrôle coercitif ne veut pas dire ne rien faire, mais le faire sous contrôle et coercition.

Le contrôle coercitif est un modèle débattu mais solide, qui fait l’objet de recherches tant qualitatives (avec des entretiens avec des victimes par exemple) que quantitatives (avec l’analyse de données tirées d’études de population sur les violences). Cette notion permet de réinsérer les notions de pouvoir et de contrôle au cœur de la compréhension de la violence conjugale (ce que les féministes ont toujours défendu).

Gwénola Sueur et Pierre-Guillaume Prigent

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Colloque international sur les violences post-séparation : « L’impossible rupture »

Gwénola Sueur, Co-fondatrice du Réseau International des Mères en Lutte / Photographie Simon Lapierre

[pour accéder à la traduction – for translate : cliquer ici ]

Un colloque international sur les violences post-séparation en Belgique

La maison d’accueil pour femmes Solidarité Femmes de La Louvière, en Belgique, a fêté ses 40 ans en octobre 2019. À cette occasion fut organisé un colloque international intitulé « L’impossible rupture » les 15 et 16 octobre 2019.

Invité.e.s par Solidarité Femmes nous y sommes intervenu.e.s. Nous avions publié, en septembre 2019, un article : Contrôler les femmes après la séparation ou « l’impossible rupture ». Nous y annoncions cette conférence et présentions des informations sur le contexte belge, ainsi que l’étude d’Emmanuelle Mélan. Emmanuelle Mélan, criminologue, a réalisé des entretiens auprès de femmes. Elle a  complété ses entretiens par un questionnaire. 79 % des femmes sondées déclarent alors encore subir des violences après une séparation, celles-ci pouvant remonter à plus de 5 ans.

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L’impossible rupture. Clés de lecture et chiffres pour penser la sécurité des femmes et enfants dans un contexte de violences conjugales post-séparation, Emmanuelle Mélan

« Les violences conjugales post-séparation affectent un nombre important de femmes et d’enfants et la séparation représente un risque accru de dangerosité  » . Or, les conférences sur les violences après la séparation restent rares. Non seulement peu de chercheur.e.s travaillent sur cette problématique, encore moins avec une analyse féministe. Par ailleurs les médias s’intéressent peu à ces sujets et persistent à ignorer les recherches en cours. Alors que les expertes du Grevio invitent à former l’ensemble des intervenant.e.s auprès des victimes au mécanisme des violences après la séparation, peu de structures offrent des modules de formation, alliant rigueur scientifique et prise en compte de l’expérience des survivant.e.s.

En octobre 2015, l’Université des Femmes de Bruxelles avait abordé cette thématique, en proposant une journée d’étude sur le continuum des violences patriarcales le 14 octobre 2015.

Le continuum des violences patriarcales, 14 octobre 2015, Bruxelles / Photographie Université des Femmes de Bruxelles

Au Canada le collectif de recherche FemAnVi avait organisé une conférence internationale intitulée « Perspective internationale sur la violence post-séparation » les 11 et 12 avril 2017 à Ottawa. Des expert.e.s de plusieurs pays s’étaient réuni.e.s afin de réfléchir à la manière de protéger les femmes et les enfants vivant dans un contexte de violence post-séparation. Les constats de l’ensemble des intervenant.e.s se recoupaient et mettaient en avant la négation des violences après la séparation.

La situation française et la complicité institutionnelle avec l’agresseur furent présentées par Pierre-Guillaume Prigent et Gwénola Sueur : « Les mères séparées et leurs enfants face à la stratégie des agresseurs et à la complicité institutionnelle en France« . Illes se sont appuyés sur leur travail de recherche et leur soutien auprès de mères séparées et divorcées.

Plan de leur communication

  • Stratégies des agresseurs (stratégies discursives et législatives des groupes de pères séparées et divorcés en France)
  • Discours masculinistes et lobbying : quels bénéfices pour les hommes violents ?
  • État des lieux des violences post-séparation en France (constats des associations, présentation d’une étude de cas avec le récit d’une mère protectrice accusée d’aliénation parentale)
  • Pistes de réflexion (contrer les discours antiféministes, préconisations françaises)

« L’impossible rupture ». Penser la sécurité des femmes et des enfants en contexte de violences conjugales post-séparation

Patrizia Romito et Édouard Durand / Photographie RIML

Simon Lapierre / Photographie RIML

Pierre-Guillaume Prigent / Photographie RIML

Les 15 et 16 octobre 2019 plus de 300 personnes ont assisté à ces deux journées exceptionnelles : c’est la première fois en Belgique qu’était organisée une conférence d’une telle ampleur. La conférence fut filmée, une partie des interventions sont désormais en ligne. Nous vous invitons à les découvrir.

Allocutions de : Josiane Coruzzi – Jacques Gobert – Christie Morreale – Nathalie Vandenplas

Josiane Coruzzi

Emmanuelle Mélan

Patrizia Romito

Simon Lapierre

Gwénola Sueur

Pierre-Guillaume Prigent

Mots clés : contrôle coercitif – violences post-séparation – stratégie des pères violents – complicité institutionnelle – instrumentalisation des institutions et de la loi – tribunaux de la famille – aliénation parentale

Denise Tremblay et Louise Riendeau

Caroline Mommer et Caroline Prudhon

Jean-Louis Simoens et Cécile Kowal

Suite à ce colloque la revue L’Observatoire a consacré un numéro spécial aux violences après la séparation. Ce dossier présente « les analyses de plusieurs des intervenants de ce colloque. Démontrant le continuum des violences conjugales au-delà de la séparation, ceux-ci expliquent les stratégies mises en place par les auteurs pour garder leur emprise sur leur ex-partenaire, la manière dont ils utilisent à cette fin leur droit de parent et instrumentalisent leurs enfants ; enfin, ils pointent les idéologies, les valeurs, voire les mythes, tel celui du syndrome d’aliénation parentale, qui persistent et continuent à influer sur les représentations de nombre d’acteurs gravitant autour de ces situations : services psychosociaux, justice, police, … ».

Nous remercions l’équipe de Solidarité Femmes de nous avoir convié.e.s à participer à ce colloque et de leur accueil particulièrement chaleureux à La Louvière.

Le Réseau International des Mères en Lutte

[maj : les conférences et allocutions sont considérées dans le droit français comme des oeuvres de l’esprit. Nous vous prions de citer correctement les intervenant-es qui ont présenté une communication le 15 et 16 octobre 2019. Par ailleurs les articles publiés dans la Revue l’Observatoire ne sont pas une retranscription des communications]

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Contrôler les femmes après la séparation ou « l’impossible rupture »

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[Pour le traduction multi-langue cliquer ici]

La Belgique a signé en 2012, puis ratifié en 2016, la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul). Depuis le mois de janvier 2019 le blog « Stop Féminicides » a répertorié 16 femmes tuées, « des femmes tuées parce qu’elles sont femmes » ;  4 enfants ont également été tués dans un contexte de violences conjugales, dont 2 en même temps que leur mère.

Depuis 2001, les acteurs/trices politiques se sont accordé.e.s sur une définition commune de la violence conjugale :

Les violences dans les relations intimes sont un ensemble de comportements, d’actes, d’attitudes de l’un des partenaires ou ex-partenaires qui visent à contrôler et dominer l’autre. Elles comprennent les agressions, les menaces ou les contraintes verbales, physiques, sexuelles, économiques, répétées ou amenées à se répéter portant atteinte à l’intégrité de l’autre et même à son intégration socioprofessionnelle. Ces violences affectent non seulement la victime, mais également les autres membres de la famille, parmi lesquels les enfants. Elles constituent une forme de violence intrafamiliale. Il apparaît que dans la grande majorité, les auteurs de ces violences sont des hommes et les victimes, des femmes. Les violences dans les relations intimes sont la manifestation, dans la sphère privée, des relations de pouvoir inégal entre les femmes et les hommes encore à l’œuvre dans notre société.

Or, dans le Rapport alternatif de la coalition « Ensemble contre les violences » envoyé au Grevio, en février 2019, les organisations de terrain constatent à travers leur pratique que la Belgique ne respecte pas ses obligations en matière de lutte contre les violences faites aux femmes.

En ce qui concerne spécifiquement les violences après la séparation, ce rapport rapporte que les autorités judiciaires estiment, la plupart du temps, que les violences à l’égard de la mère ne signifient pas que les enfants fassent également  l’objet de violences. Ils estiment souvent que les violences cessent, lors de la séparation. Les juges ont ainsi tendance à considérer qu’un mauvais mari n’est pas forcément un mauvais père.

En cas de séparations conflictuelles, la loi du 18 juillet 2006 en matière d’hébergement alterné égalitaire, implique d’opter de manière préférentielle pour une résidence en alternance.

La loi de 2006 ne prévoit aucune exception au principe de l’hébergement égalitaire, en cas de violence, et l’appréciation des violences et de leurs conséquences est laissée aux juges. Cette loi rend alors très difficile la protection des victimes de violences puisque l’orientation prise dans ces dossiers est de maintenir à tout prix un lien entre le parent violent et ses enfants. 

Il est à noter que les travaux préparatoires à cette loi font explicitement référence au Syndrome d’ Aliénation Parentale :

Avantages de l’hébergement égalitaire : l’hébergement égalitaire évite les risques de : […] une influence assez grande du parent à hébergement principal pour que l’enfant puisse développer un syndrome d’aliénation parentale (SAP). (extrait du Projet de loi du 17 mars 2005, amendement n° 51-1673/014)

Le rapport alternatif de la coalition « Ensemble contre les violences » (page 79) souligne, en ce qui concerne le SAP  :

Quant au Syndrome d’Aliénation Parentale invoqué dans les travaux préparatoires de la loi de 2006 et utilisé dans la jurisprudence, outre qu’il n’a aucun fondement scientifique, il renforce les droits des parents violents sous prétexte que l’enfant doit se construire avec ses deux parents et perpétue l’idée que les fausses allégations sont nombreuses et que les violences conjugales sont rares. Cette idée a tendance à discréditer la parole des femmes et des enfants et établit une confusion entre conflit et violence conjugale. En conclusion, le SAP contribue au bâillonnement des femmes et des enfants.

Peu de temps après la publication de ce rapport, les premiers résultats d’une étude en Fédération Wallonie-Bruxelles confirme que pour la majorité des femmes victimes de violences conjugales, ces violences perdurent après la séparation (1).

Emmanuelle Mélan  est chercheuse en criminologie à l’UCL et travaille à mi-temps au collectif et refuge pour femmes victimes de violences conjugales (ASBL Solidarité Femmes) de La Louvière, présidé par Josiane Coruzzi.

Emmanuelle Mélan a réalisé des entretiens auprès de femmes. Elle a ensuite complété ses entretiens par un questionnaire. 79 % des femmes sondées déclarent encore subir des violences après une séparation, celles-ci pouvant remonter à plus de 5 ans.

Les résultats montrent que les violences post-séparation sont occasionnellement physiques. Elles sont surtout d’ordre psychologique et moral (harcèlement, contrôle, menaces de violences physiques ou de mort, dénigrement auprès des enfants, alliance avec ces derniers ou avec l’entourage) en vue de nuire et porter atteinte à l’intégrité psychique des femmes. L’étude montrent que les violences sont également d’ordre économique (non respect de paiement de la pension alimentaire).

Par ailleurs, l’étude met en avant que les enfants sont les instruments du continuum des violences lors des procédures juridiques. En effet 80 % de femmes ont dû faire face à un partenaire qui, par une attitude non collaborative, a rendu la procédure difficile, de manière régulière voire constante. Les femmes concernées sont près de la moitié à avoir répondu que monsieur avait tout le temps eu un comportement déstabilisant visant à rendre les choses pénibles. Il utilise alors essentiellement les enfants afin d’arriver à ses fins.

La chercheuse dénombre par ailleurs quatre stratégies violentes et anxiogènes pour la mère, stratégies utilisées de manière permanente (tout le temps) ou régulière (souvent) :

  • menacer de faire perdre la garde des enfants (80 % des dossiers) ;
  • utiliser l’enfant pour contrôler et piéger la mère (89 %) ;
  • faire alliance avec l’enfant contre la mère (92 %) ;
  • faire de fausses allégations et dénigrer (92 %).

Enfin l’étude souligne que  la peur continue à être présente chez un tiers de ces femmes,  peur qui est encore plus présente (43 %)  lorsqu’il s’agit de la sécurité de leur(s) enfant(s).

En ce qui concerne les droits de visite et la sécurité le rapport alternatif de la coalition « Ensemble contre les violences » recommande de :

  • former les juges et avocats, ainsi que les professionnel.le.s de la sphère psychosociale aux mécanismes des violences et à la différence entre conflit et violence, à leur persistance après la séparation et à leurs impacts sur les enfants ;
  • modifier la loi de 2006 sur « l’hébergement égalitaire » de façon à ce que l’impact des violences conjugales sur les enfants soit pris en considération par les magistrat.e.s dans les décisions relatives au droit de garde, à l’hébergement, à l’exercice de l’autorité parentale et aux droits de visite (lieux sécurisés, horaires adéquats, etc.).

Les  mardi l’ASBL Solidarité Femmes organise à La Louvière un colloque international sur la question des violences post-séparation :

L’impossible rupture. Penser la sécurité des femmes et des enfants en contexte de violences conjugales post-séparation

L’association a invité un panel d’experts internationaux (France, Italie, Canada) à faire part de leur expérience, des recherches qu’ils ont menées et des bonnes pratiques qui ont cours dans leur pays sur la question des violences post-séparation. Nous y serons.

Le Réseau International des Mères en Lutte

(1) : Mélan, E., « Les violences post séparation en Fédération Wallonie-Bruxelles. État de la question, témoignages et recommandations pour penser la sécurité des victimes », première partie, réalisée avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Novembre 2018, Solidarité Femmes ASBL, La Louvière, 80 pages. Publication en cours.

Mélan, E. (2019). Chronique de criminologie. Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, 2(2), 489-503.

[Maj : comme pour nos autres articles des éléments sont mobilisés dans des publications (rapport, communiqué de presse, chapitre d’ouvrages sans peer review) sans que nous ne soyions ensuite correctement cité-es ou ne donnions notre accord pour une éventuelle traduction]

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La responsabilité institutionnelle dans la mise en danger des enfants

Ferederiko

(extrait du power point de Patrizia Romito, photographie réalisée à Ottawa le 11 avril 2017)

[Pour accéder à la traduction automatique cliquer ici ]

Les violences conjugales post-séparation sont de la même nature que les violences conjugales. Selon  la Professeure italienne Patrizia Romito, « il s’agit d’un ensemble de comportements caractérisé par la volonté de domination et de contrôle d’un partenaire sur l’autre, qui peuvent inclure brutalités physiques et sexuelles, abus psychologiques, menaces, contrôles, grande jalousie, isolement de la femme ainsi que l’utilisation des enfants à ces fins ».

Elle précise que les motivations à ces violences peuvent être regroupées en trois catégories : les représailles et la vengeance, le rétablissement de la situation de pouvoir et de contrôle, la tentative de forcer une réconciliation qui permet le rétablissement du contrôle. Les violences conjugales post-séparation affectent un nombre important de femmes et d’enfants et la séparation représente un risque accru de dangerosité.

De fait une absence de repérage des situations à risques ainsi qu’une mauvaise décision en matière de justice aux affaires familiales peuvent avoir des conséquences dramatiques, allant du transfert de résidence des enfants chez le parent violent, aux meurtres des femmes et des enfants.

Les violences létales après la séparation : tuer les enfants pour punir la mère

En Grande-Bretagne, l’analyse par Hilary Saunders de la situation de 29 enfants qui ont été tués par leur père après la séparation montre que ces homicides avaient eu lieu dans un contexte de négociations très conflictuelles entre les parents pour la garde des enfants ou le droit de visite. Dans les 13 familles analysées, la quasi totalité des mères avaient subi des violences conjugales. Pourtant le tribunal les avait obligées à accepter des contacts entre le père et les enfants.

Au Canada, lors du colloque Perspectives internationales sur la violence post-séparation organisé par FemAnVi, les 11 et 12 avril 2017, Patrizia Romito a illustré la responsabilité institutionnelle dans ces meurtres. Elle est notamment revenue sur la mort de Federiko Barakat en Italie.

Le 25 février 2009, ce petit garçon de huit ans est tué par son père dans les locaux des services sociaux de San Donato Milanese. Suite à la séparation qui intervient après des violences conjugales, sa mère Antonella Penati cherche à mettre en sécurité l’enfant mais elle est accusée d’aliénation parentale. Des contacts sont alors ordonnés et mis en place pour rétablir le lien entre le père et l’enfant. Le père tue Federiko lors d’une visite supervisée avec une arme à feu, puis s’acharne sur l’enfant en le frappant de plusieurs coups de couteau, avant de se suicider.

En Espagne, sur une période de 7 années, 29 enfants ont été tués par leur père pour se venger de leur mère. Ces meurtres sont comptabilisés à partir de 2013, puisque ces victimes sont considérés comme des victimes de violence de genre dans les statistiques officielles.

Dans une récente interview, le professeur en médecine légale à l’université de Grenade , Miguel Lorente Acosta, revient sur le cas des enfants tués. Il déplore qu’une personne condamnée avec injonction contre son ex- femme ou ex-conjointe puisse encore continuer à avoir accès aux enfants. Puis il ajoute :

Un agresseur ne peut jamais être un bon père. Ils ont appris qu’il y a un moyen de faire encore plus de mal avec la mort des enfants.

Un père, Tomás Bretón, est condamné en juillet 2013 à 40 ans de prison pour le meurtre de ses deux enfants, Ruth (six ans) et José (deux ans). Il les tue en représailles à la demande de son épouse de se séparer. La mère des deux enfants, Ruth Ortiz, a témoigné afin d’obtenir du Parlement un consensus pour réformer la loi intégrale et inclure les mères des enfants tués comme victimes de violence sexiste. Elle analyse :

Les agresseurs savent ce qu’est le plus grand mal et le plus grand mal est de prendre la vie de vos enfants.

Il est à souligner que la Cour Suprême a condamné l’Espagne en 2018 a versé une indemnité de 600 000 euros à une mère, Ángela González, pour la responsabilité des autorités espagnoles à l’égard du décès de sa petite fille Andrea, âgée de sept ans. Elle a été assassinée par son père lors d’une visite non supervisée autorisée par un juge.

Aux États-Unis ce sont près de 700 enfants qui ont été tués par leurs parents au cours d’un divorce ou d’une séparation depuis 2008, selon le Center for Judicial Excellence, un organisme basé en Californie.

Les avocats d’une mère survivante, Hera McLeod , lors de la procédure de garde pour son petit garçon Prince, lui ont conseillé de faire attention à ce qu’elle disait au sujet du père de l’enfant, Joaquim Rams, et aux détails à divulguer au sujet de son comportement violent. La mère souhaitait une mise en sécurité suite aux nombreuses violences de cet homme. Le juge a pourtant estimé qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves. Après avoir ordonné à Hera McLeod des visites supervisées entre le père et Prince, le juge décide de lui accorder des droits de visites non supervisés. C’est lors de la quatrième visite le 20 octobre 2012 que l’enfant est tué par son père. Prince était âgé de 15 mois.

Un article de Samantha Schmidt, publié le 29 juillet dans le Washington Post revient sur les filicides dont celui de Prince et de la petite Kyra Francheti, puis présente en exclusivité les derniers résultats de l’étude de Joan Meier. Car si ces infanticides semblent être des situations extrêmes, ils illustrent néanmoins la tendance des tribunaux de la famille à ne pas croire les mères lorsqu’elles demandent à être mise en sécurité avec leurs enfants.

L’étude de Joan Meier

L’étude inédite de l’Université George Washington réalisée par la professeure de droit Joan S. Meier, montre que les mères qui signalent des cas de violence – en particulier des violence faite aux enfants – perdent la garde de leurs enfants à une fréquence stupéfiante.

Dans un article de 2017, elle rend compte de l’analyse de  238 jugements entre 2002 à 2013 aux États-Unis. Ces jugements concernent la résidence d’enfants de parents séparés, et leur analyse apporte des éléments sur le lien entre aliénation parentale et violence. Dans cette étude, les accusations d’aliénation parentale conduisent les tribunaux à ne pas prendre en compte les preuves de violences paternelles envers les femmes et les enfants, à retirer des enfants aux parents (principalement les mères) qui veulent les protéger et à placer ou fixer leur résidence chez l’agresseur, même lorsque des juges reconnaissent l’existence de violences. Ainsi,  les femmes qui présentent des preuves de violence envers les enfants sont plus susceptibles d’en perdre la garde, que les femmes qui signalent uniquement de la violence conjugale. Les accusations d’aliénation parentale en réponse à ces dévoilements doublent pratiquement le taux de perte de résidence des enfants par les mères.

Dans une intervention de novembre 2018, Joan Meier et son équipe de recherche complètent les résultats. 4 338 jugements de 2005 à 2015 ont été analysés. Tous types de violences confondus (violence conjugales, violences contre les enfants, violences sexuelles contre les enfants), les accusations réalisées par les mères ne sont reconnues que dans 41 % des cas, et quand une accusation d’aliénation parentale est portée, dans 23 % des situations seulement. En outre ce sont les accusations de violences sexuelles sur les enfants qui sont les moins reconnues (15 %), et elles ne le sont presque jamais quand l’aliénation parentale est mobilisée par le père (2 %, 1 sur 51). Ainsi, lorsque l’aliénation parentale est utilisée par le père comme moyen de défense, la probabilité que le juge reconnaisse la violence est divisée par 2, et presque par 4 quand il s’agit de violence contre les enfants.

L’accusation d’aliénation parentale par les pères a également une incidence sur la résidence des enfants. En effet, lorsque la mère accuse le père de violence, la résidence est transférée chez lui dans 26 % des cas quand il ne se sert pas de l’aliénation parentale, et dans 44 % dans cas lorsqu’il mobilise ce pseudo-concept. Elle constate par ailleurs que même lorsque les violences sont reconnues, et que l’aliénation parentale est utilisée, la résidence est transférée dans 43 % des cas (6 sur 14).

Pour résumer, ces données « confirment les nombreux témoignages de femmes qui dénoncent l’ignorance par les tribunaux de la famille de la violence, ce qui met potentiellement les enfants en danger. Elle confirme également que les accusations d’aliénation sont efficaces pour occulter la violence ». L’étude comporte cependant deux limites principales : elle ne démontre pas que le rejet par les tribunaux des accusations de violences est erroné, mais seulement qu’il est répandu. De plus, l’étude est également axée sur les affaires en appel, qui peuvent présenter certaines différences avec les affaires en première instance.

Conclusion

Au Canada, des rapports et des recherches universitaires visent à identifier les situations à risques. Par exemple, en novembre 2012, un comité d’experts sur les homicides intrafamiliaux remet au ministre de la Santé et des Services sociaux et au ministre responsable des aînés un rapport proposant des recommandations. En 2014 la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes publie à son tour un document qui vise à faire connaître ses recommandations en matière de prévention des homicides intrafamiliaux.

Au Royaume-Uni, le gouvernement a lancé le 19 juillet à un appel à témoigner aux victimes, afin d’examiner les risques que courent les enfants qui entretiennent une relation avec un parent ayant des antécédents de comportement violent. Ce projet est supervisé par un groupe d’expert.e.s et souhaite mettre en lumière la manière dont les tribunaux de la famille gèrent la sécurité et le bien-être des enfants lorsqu’il existe un risque de violence familiale.

En France, la publication chaque année de l’Étude nationale sur les morts au sein du couple de la Délégation Aux Victimes permet de connaître le nombre d’enfants tués dans deux situations entre 2006 et 2018.

111 enfants furent tués en même temps que leur parent (la mère dans 110 situations sur 111)

182 enfants furent tués « en raison de séparations difficiles ou de conflits de couple (tandis que l’autre parent n’est pas victime) » (c’est l’intitulé de la DAV)

L’auteur de ces 292 meurtres ou assassinats était de sexe masculin dans une écrasante majorité des situations. La mission sur les morts violentes d’enfants au sein des familles confirme également le « lien très fort entre  entre la violence conjugale et les violences commises sur les enfants ».

Par l’intermédiaire de la veille féministe de Féminicides par compagnon et ex-compagnon , nous apprenons que plus d’une dizaine d’enfants ont été tués par leur père depuis le début de l’année 2019. Alors que des membres du mouvement des intérêts des pères séparés et divorcés considèrent parfois ces hommes comme des martyrs du divorce et vont jusqu’à présenter comme unique solution à ces meurtres la systématisation de la résidence en alternance, que compte faire le gouvernement français pour mettre en sécurité les enfants ?

Le Réseau International des Mères en Lutte (GS)

[Maj] Le 17 août 2020 le gouvernement publie l’Étude nationale sur les morts violentes au sein du couple. Ce rapport déclare page 26 que  » 25 infanticides ont été commis dans un contexte conjugal ». Il précise que : « 3 mineurs ont été tués concomitamment à l’homicide de leur mère dans 3 affaires distinctes. Dans ces affaires, 1 auteur s’est suicidé ». Puis le rapport ajoute que  » Dans 14 affaires distinctes, 22 enfants ont été tués dans le cadre d’un conflit de couple sans qu’aucun membre du couple ne soit victime. L’auteur de l’infanticide est majoritairement le père (12 affaires), la mère l’ayant été à 2 reprises ».

[Maj] 1er septembre 2022. L’ Étude nationale sur les morts violentes au sein du couple de 2020 indique page 26 que « 8 mineurs ont été tués concomitamment à l’homicide de leur mère dans 4 affaires distinctes. Dans ces affaires, 1 auteur s’est suicidé et 2 autres ont tenté de le faire. » Puis le rapport précise que dans  » dans 6 affaires distinctes, 6 enfants ont été tués dans le cadre d’un conflit de couple sans qu’aucun membre du couple ne soit victime. L’auteur de l’infanticide est majoritairement le père (3 affaires), dont l’un s’est suicidé, la mère l’ayant été à 2 reprises et le beau-père à une ».

[Maj 1er septembre 2022. Le rapport de 2021 indique page 26 qu’en 2021 aucun mineur n’a été tué concomitamment à l’homicide de l’un de ses parents. Puis le rapport précise que « dans 10 affaires distinctes, 12 enfants ont été tués dans le cadre d’un conflit de couple sans qu’aucun membre du couple ne soit victime. Le père et la mère sont auteurs dans les mêmes proportions. 3 pères et 1 mère se sont suicidés à l’issue et 1 mère a tenté de le faire ».

Ainsi entre 2006 et 2021 :

  • 122 enfants furent tués en même temps que leur parent (la mère dans 121 situations sur 122)
  • 222 enfants furent tués « en raison de séparations difficiles ou de conflits de couple (tandis que l’autre parent n’est pas victime) » (c’est l’intitulé de la DAV)

 

contrôle coercitif, féminicides, violences conjugales

16 femmes tuées par leur conjoint ou ex-compagnon en janvier 2019

Depuis janvier 2016 des militantes féministes réalisent une veille des féminicides conjugaux et post-conjugaux. Ce travail est éprouvant, nous les remercions de poursuivre ce décompte chaque année. Voici une série de slides en effet

Il faut parfois se confronter à l’horreur, la révéler pour qu’elle ne continue pas à se dérouler, masquées par les stratégies d’occultation.

En janvier 2019 16 femmes ont été tuées par leur conjoint ou leur ex-compagnon.

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Le bilan du premier semestre 2019, réalisé par la veille des bénévoles du collectif Féminicides par compagnon ou ex, s’élève à 74 femmes tuées au 7 juillet 2019. Au 15 août, les militantes féministes ont décompté 91 femmes tuées par leur compagnon ou ex, soit 17 femmes de plus depuis l’annonce d’un Grenelle qui aura lieu le 3 septembre 2019. Des enfants ont également été tué en même temps que leur mère ou dans un « contexte de séparation ».

Le Réseau International des Mères en Lutte (article révisé au 15 août 2019).

[Maj] Le 17 août 2020 le gouvernement publie l’étude nationale sur les morts violentes au sein du couple.